Suite de la présentation du roman "Sorbonne Confidential" débuté hier avec l'interview de l'auteur, Laurel Zuckerman...
Pourquoi tout d’abord avoir décidé, après votre licenciement, de vous engager dans l’enseignement au lieu de poursuivre votre carrière dans le privé ?
Après 18 ans d’entreprise et notamment plusieurs dernières années dans une dot-com un peu étrange, j’avais véritablement envie de changer de voie. Un virage normal aux Etats-Unis où il est tout à fait possible à 40 ans de devenir journaliste ou infirmière… Souvent confrontée aux demandes d’amis et d’autres parents souhaitant que j’enseigne l’anglais à leurs enfants, j’ai donc eu envie de m’engager dans cette voie. Mais en suivant la voie classique et non pas de façon précaire comme nombre d’autres anglophones.
Vous avez donc intégré Paris IV pour y passer l’agrégation… Qu’est-ce qui vous a finalement le plus choqué à votre arrivée là-bas ?
J’ai vite compris la complète déconnection entre le concours
et l’enseignement concret de l’anglais. Peu de pratique de la langue, absence
de cours de méthodologies d’enseignement… De quoi diplômer de brillants
linguistes mais pas de former des pédagogues.
Aujourd’hui, le principal reproche fait aux enseignants
français de langue vivante est leur trop grand recours au français, leur hyper
sévérité et le fait qu’ils n’encouragent pas leurs étudiants à s’exprimer à
l’oral. Mais ce comportement n’est rien d’autre que le reflet de ce qu’ils vivent
à l’université…
Si vous étiez ministre de l’Education nationale, que
reverriez-vous dans l’enseignement des langues vivantes ? Des actions à plusieurs niveaux sont nécessaires : 1) Au plus haut niveau, nommer un responsable qui a pour seul objectif de réussir l’enseignement de langues vivantes dans l’école publique. Attention : trop souvent les missions de « promouvoir le plurilinguisme » ou « défendre le français », se servent d’excuse pour mal enseigner l’anglais. Il faudrait établir des objectifs et les atteindre. 2) A l’école primaire, arrêter de faire semblant d’enseigner l’anglais, en abusant de la bonne volonté des maîtres et maîtresse qui souvent ne maîtrisent ni l’anglais ni l’enseignement des langues étrangères. Et embaucher des enseignants de langues compétents, dès la rentrée, avec des classes par niveau de compétences. 3) Redynamiser la formation de professeurs : recruter les meilleurs pédagogues au niveau mondial pour former les professeurs de langues vivantes. 4) Au collège et lycée, privilégier la formation continue des professeurs en récompensant ceux qui améliorent leur compétences pédagogiques au lieu de récompenser les professeurs qui passent l’agrégation, qui exige, par exemple, un dissertation cartésienne en français ! 5) Transférer l’argent gaspillé dans les concours de recrutement (90% d’échec—quel gâchis !) vers le financement de formation continue et l’augmentation des salaires des professeurs. 6) Réduire les déductions d’impôts consentis pour les cours de soutien de langues vivantes et réinvestir cet argent dans l’enseignement public. 7) Ouvrir l’enseignement de langues vivantes aux professeurs étrangers dont les compétences sont reconnues en Europe mais qui n’ont pas passé les concours français. 8) Pour les collèges et lycées affichant les pires résultats en langues vivantes, permettre le recrutement libre de professeurs hors éducation nationale. A quel moment avez-vous décidé d’écrire ce livre ?
Dès le premier jour, lorsque l’on m’a expliqué qu’il me faudrait suivre les cours de laboratoire de langues pour bien savoir restituer les textes anglais dans un français soutenu… Il est dès lors facile de comprendre la difficulté qu’auront les anglophones à réussir l’examen… Si le but était de s’assurer du niveau de français des enseignants, ne serait-il pas plus simple d’imposer un contrôle en début de cursus pour ensuite faire du concours une compétition véritablement en rapport avec l’anglais ? Ne nous étonnons pas si une grande évaluation menée en 2002 sur la maîtrise de l’anglais dans plusieurs pays de l’Union Européenne a placé la France bonne dernière.
Avez vous un prochain livre en projet ?
Ce sera cette fois-ci une véritable fiction retraçant le travail d’un historien confronté à ses sources et à l’interprétation qu’il peut en faire dans notre très politiquement correct 21e siècle…
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